Me Nicolas Taiclet
Représentant de la Chambre Interdépartementale des notaires pour le département de la Côte d'Or
www.notaires.fr
Comment ont évolué, cette année, les prix de l'immobilier sur Dijon et sa périphérie ?
2022 était une année correcte pour l'immobilier, avec des taux bancaires qui restaient très attractifs. Nous sortions de belles années, avec des hausses consécutives et conséquentes sur le marché de l'ancien : + 4% en août 2019, + 9,1 % en 2020, + 9,6 % en 2021 et + 6,1 % en 2022 pour les appartements ; + 1,6 % en août 2019, + 3,2 % en 2020, + 8,4 % en 2021 et+ 7,4 % en 2022 pour les maisons.
Cette année, nous sommes en pleine crise immobilière. Le journal « Les Échos » a récemment sorti un article confirmant que les notaires connaissaient « leur plus grande crise depuis 30 ans ». Elle est causée par plusieurs raisons cumulées :
• les exigences bancaires qui se durcissent ;
• la hausse des taux d'intérêt qui prive un grand nombre d'acquéreurs potentiels de capacité d’emprunt ;
• les contraintes énergétiques de plus en plus nombreuses ;
• l'inflation constatée sur le prix des matériaux de construction ;
• la disparition de tout système d'incitation fiscale à l'investissement immobilier à compter de fin 2024
Les prix de l'ancien en baisse pour la première fois depuis des années
En ce moment, les taux d'emprunt bancaire sont trois à quatre fois plus hauts que les dernières années et les prêts sont de plus en plus difficilement accordés. 40 % des ménages qui pouvaient emprunter en avril 2023 n'en sont plus capables en octobre, à cause des taux qui évoluent chaque semaine et des exigences bancaires accrues. Le profil des primoaccédants a changé, avec des acheteurs plus âgés et disposant d'un important apport financier initial.
Après plusieurs années de hausse, la tendance s'inverse pour les prix de l'immobilier ancien sur Dijon, avec une baisse de 0,6 % pour les appartements et de 1,3 % pour les maisons. Les quartiers les plus chers présentent des prix autour de 3 000 €/m2, comme celui du Centre Nord (3 110€/m2, +7,6%), de la Toison d'Or ou de Montchapet (+6,4%). La zone présentant les prix les plus bas reste le quartier de Fontaine-d'Ouche (-2%), avec un prix au mètre carré de 900€.
En 2023, on constate une baisse du nombre de ventes de maisons sur Dijon (855 en août 2023 contre 933 en octobre 2022) et la Côte-d'Or (3 900 en août 2023 contre 4 300 en octobre 2023). Un plus grand nombre de maisons est donc disponible sur le marché, avec des prix en baisse.
Dans les communes périphériques, les tendances sont les mêmes qu'à Dijon, même si on constate des baisses plus importantes dans certaines communes, comme à Chevigny-Saint-Sauveur (-8%). Pourtant à Longvic et à Beaune, le prix des appartements a augmenté de 10 et 11 %, respectivement. Les prix sur Nuits-Saint-Georges sont stables (+0,9%), avec un pic à +4 % sur la côte viticole.
Le marché du neuf en crise aiguë
Sur le marché du neuf, la situation est encore pire, puisque les prix ont augmenté de 9,7 %à Dijon et de 12,7 % sur la périphérie dijonnaise entre septembre 2022 et août 2023. Le manque de terrains disponibles oblige aujourd'hui les promoteurs à acheter des parcelles bâties et à détruire les maisons qui y sont construites avant de lancer leur nouveau chantier.
L'inflation est aussi passée par là, avec une hausse significative des prix des matériaux de construction ce qui a des répercussions sur les prix de vente des logements neufs. Fin 2024, il n'existera plus de programme de défiscalisation pour inciter les particuliers à investir dans la pierre, puisque le programme Pinel ne sera pas prorogé. Pour les promoteurs, tous ces facteurs sont catastrophiques. Ils sont confrontés à des licenciements, des annulations de contrats de réservations, l'arrêt brutal de chantiers de construction ou la vente en bloc de bâtiments à prix coûtant.
Rénovation énergétique : des coûts trop élevés ?
La rénovation énergétique des logements les plus énergivores (seuls les logements classés G sont pour l'heure concernés et seront rejoints par les logements classés F en 2028) est désormais obligatoire pour les proposer en location. Mais les propriétaires n'ont pas forcément les moyens financiers et les possibilités techniques pour rénover leurs biens. La fiscalité est de plus en plus forte sur les revenus fonciers, et nous pouvons constater que les taxes foncières atteignent parfois un montant équivalent à plus d'un mois et Chiffres communiqués par la chambre des notaires de Côte d'Or demi de loyer. Certains propriétaires n'ont donc plus les ressources nécessaires pour financer les travaux de rénovation énergétiques.
Face à cette fiscalité très lourde, on voit de plus en plus de propriétaires revendre leurs biens immobiliers pour investir leur épargne dans des produits moins contraignants et qui rapportent plus. Pourtant, l'immobilier est toujours un investissement intéressant sur le long terme.
Comment voyez-vous l'année 2024 ?
La tendance de 2023 se poursuivra probablement dans les premiers mois de 2024. Nous nous attendons à une baisse des volumes de vente et des prix, mais il faut savoir rester optimiste. La hausse des taux va finir par se calmer. Il ne faut pas grand-chose pour que le marché reprenne : une stabilisation des taux, des leviers pour faciliter la rénovation énergétique, une levée pérenne des contraintes qui pèsent sur les acheteurs, etc. Nous espérons de meilleures nouvelles pour fin 2024 I